Par Piechion Benjamin
Abidjan, 29 août 2025 (AIP)-À une trentaine de kilomètres d’Abidjan, au cœur d’un écrin verdoyant et apaisant, le Centre de service civique de Bimbresso se dresse comme un refuge d’espérance.
Plus qu’un simple lieu d’hébergement et de formation, il incarne un véritable laboratoire de renaissance pour une jeunesse longtemps reléguée aux marges de la société.
Ceux qui avaient décroché de l’école, perdu pied dans la vie active ou sombré dans l’errance y retrouvent un souffle nouveau : une voie de résilience, de reconstruction et de dignité retrouvée.
Un lieu de discipline et de réapprentissage
Le centre ne transmet pas uniquement des savoir-faire. Il inculque une manière d’être, une philosophie de vie, une posture nouvelle face au monde.
Dans un cadre à la fois rigoureux et bienveillant, les pensionnaires réapprennent à se tenir debout. Leurs journées, rythmées par la discipline, l’effort physique, l’instruction civique et la formation professionnelle, forgent lentement mais sûrement un changement profond.
Ce qui, au départ, semble imperceptible, se révèle bientôt éclatant aux yeux de tous.
Les témoignages des bénéficiaires illustrent avec force la puissance de cette transformation. Konan Anne, aujourd’hui responsable d’un atelier de couture, raconte que sa vie, autrefois figée et sans horizon, a pris un nouvel élan grâce à son passage au centre.
Elle n’y a pas seulement acquis des compétences techniques, mais surtout la confiance et la force de croire en elle. Keita Assane, devenu professionnel du bâtiment, incarne également cette reconversion silencieuse mais profonde, enracinée dans les valeurs transmises : discipline, engagement, respect de soi et des autres.
Ce centre, un pont entre l’échec et la promesse d’un avenir meilleur.
La métamorphose dépasse largement les pensionnaires eux-mêmes. Elle pénètre les foyers, ravive des familles brisées, restaure la fierté des parents. Fofana Dodiomon, bouleversé, confie avoir retrouvé un fils métamorphosé : calme, poli, déterminé, presque méconnaissable.
De son côté, Brou N’doli Ben Abib témoigne avec reconnaissance du changement radical de son enfant, autrefois dépendant et instable, aujourd’hui transformé jusque dans ses habitudes les plus profondes. Ces récits, fragments d’humanité, témoignent de l’impact durable du centre sur la société tout entière.
Une école de citoyenneté
Le centre de Bimbresso n’est pas une école ordinaire. C’est une maison de réapprentissage humain, un pont entre l’échec et la promesse d’un avenir meilleur.
Les jeunes y adoptent une nouvelle posture : active, responsable, tournée vers l’action et non plus vers la résignation. Le sport quotidien, les exercices collectifs, la rigueur et les leçons de civisme forment un ensemble cohérent qui façonne des citoyens conscients et engagés.
Ce processus trouve une illustration saisissante lors des journées portes ouvertes, quand les familles retrouvent leurs enfants. Les rires se mêlent aux larmes, l’émotion est palpable. Ces retrouvailles prennent des allures de renaissance, comme si ces jeunes que l’on croyait perdus revenaient d’un long voyage, marqués à jamais par leur expérience.
La vision du gouvernement
La discipline retrouvée.
Au-delà de Bimbresso, le gouvernement ivoirien a déployé sur l’ensemble du territoire un véritable réseau de centres de service civique, devenus des creusets d’espérance pour des milliers de jeunes vulnérables.
De Bouaké à Guédikpo, en passant par Guinguéréni, ces structures incarnent une seconde chance offerte à ceux qui, hier encore, semblaient condamnés à l’oubli.
Selon le directeur général de l’Office du service civique national (OSCN), Amara Coulibaly 6 199 jeunes dont 2 254 jeunes femmes ont déjà bénéficié depuis 2018 d’un accompagnement et de formations dans le cadre du Service civique d’action pour le développement (SCAD). Chaque parcours représente un destin réorienté, un avenir redessiné.
Et l’ambition s’accroît. Pour l’année 2025, le gouvernement prévoit le recrutement de 4 000 jeunes en situation de vulnérabilité dans les centres existants. Mais l’État ivoirien ne s’arrête pas là : il vient de valider la construction de dix nouveaux centres, chacun doté d’une capacité d’accueil de 1 000 pensionnaires, pour un investissement global de 26,6 milliards de FCFA.
Déjà, trois nouvelles structures à Adzopé, Daloa et Korhogo s’apprêtent à ouvrir leurs portes dans les prochains mois.
À terme, 14 centres mailleront le territoire national, permettant de former jusqu’à 14 000 jeunes chaque année. Un maillage inédit, qui traduit une volonté claire : ne laisser personne au bord du chemin.
Au-delà des chiffres, c’est une philosophie qui se dessine. Ces centres n’ont pas seulement vocation à former des artisans ou des ouvriers. Ils visent à façonner des citoyens responsables, conscients de leurs devoirs, animés par le respect, la discipline et l’amour du travail bien fait.
Dans une société marquée par les fractures sociales et le désarroi d’une partie de sa jeunesse, ce dispositif devient une véritable école de résilience et de citoyenneté.
Ainsi, chaque promotion formée dans ces centres témoigne de l’engagement de l’État à construire, pierre après pierre, une génération nouvelle. Une génération capable de transformer ses fragilités en force, et d’inscrire son destin dans le récit collectif d’une Côte d’Ivoire plus solidaire et confiante en son avenir.
En Afrique, des milliers d’enfants en rupture sociale appelés microbes en Côte d’Ivoire, kalunas en République démocratique du Congo (RDC ou area boys au Nigeria sombrent dans la violence faute d’encadrement, mais des initiatives locales démontrent qu’avec une main tendue, ils peuvent redevenir acteurs de leur propre avenir.
(AIP)